Avoir le dernier mot, coûte que coûte

Qu’ils aient tort ou raison, clouer le bec à l’autre est pour eux vital. Que cache ce besoin irrépressible d’imposer son point de vue ? Par Viviane Menétrey (MigrosMagazine.ch, avril 2013)

(…) une volonté de l’emporter sur l’autre loin d’être anodine et qui cache en réalité un manque de confiance en soi. «C’est un mécanisme de défense qui permet de couper court à la conversation sans aller plus loin dans l’argumentation, une façon de signifier que l’on a raison sans avoir à s’en expliquer, résume la psychanalyste française Nelly Jolivet

Je veux toujours avoir le dernier mot

Arguments solides ou mauvaise foi, ils ont raison quoi qu’il arrive ! Que cache cette volonté de dominer l’autre et comment lâcher prise ? Par Aurore Aimelet (Psychologies, mars 2013)

J’ai peur de l’erreur.

La psychanalyste Nelly Jolivet observe que cette insistance se manifeste dans certaines relations plutôt que d’autres. « Face à quelqu’un dont il nous semble dépendre – affectivement, financièrement -, nous pensons que nous n’avons pas droit à l’erreur, explique-t-elle. Si notre conjoint, patron, confident s’aperçoit de notre fragilité, nous risquons, croyons-nous, de le décevoir ou, pire, de le perdre. » Lorsque la relation est surinvestie et que le lien est vital; il y a urgence à se montrer infaillible. « Peut-être a-t-on souffert qu’une figure parentale – un père, une marraine, un professeur – ne nous reconnaisse pas assez dans notre identité malgré nos efforts, nos attentes, nos besoins ? » interroge la psychanlayste. Que la défaillance soit avérée ou imaginée, si l’enfant se sent invalidé par celui dont il dépend, comment peut-il survivre ? C’est cette lointaine blessure, qui, parfois, se réactive au présent dans nos relations d’adultes. Et qui nous empêche de lacher prise.

Je pleure pour un rien

Une sensibilité à fleur de peau, un débordement d’émotions, des larmes qui montent trop vite pour pouvoir être retenues… D’où vient cette hyperémotivité ? Et comment faire pour qu’elle ne soit pas un handicap ? Par Olivia Benhamou (Psychologies, janvier 2008)

(…) Selon la psychanalyste Nelly Jolivet, «cette réactivité émotionelle ramène à la petite enfance. C’est la manifestation d’un défaut dans la formation de notre réalité psychique, insuffisament stabilisée». Pour construire sa propre identité, le bébé a besoin à la fois d’être consolé lorsqu’il souffre et d’être inité et d’être inité à la frustration pour faire l’expérience de sa capacité à satisfaire ses propres besoins. «S’il est surprotégé ou si, au contraire, il éprouve une carence affective, le bébé grandira dans la dépendance, incapable de se construire comme un individu autonome et de mettre des mots sur ses propres émotions. C’est ce qui explique que, à l’age adulte, certains d’entre nous continuent de pleurer; parce qu’ils sont incapables de verbaliser leur ressenti.»

Que faire ?

(…) «Apprenez à verbaliser l’émotion, cela aide à la canaliser. Si vous avez le sentiment de ne plus être crédible aux yeux des autres, d’être infantilisé et dévalorisé par vos larmes, il faut essayer de prendre un peu de distance par rapport à l’émotion, en mettant des mots sur ce qui est étouffé par les pleurs. Cela vous aidera à comprendre ce qui vous touche et pourquoi cela vous touche à ce point. Si vous n’y arrivez pas seul, l’aide d’un thérapeute peut se révéler précieuse.»

La force de l’abandon

Importée d’Inde à la fin des années 1970, en plein essor aujourd’hui, la notion de lâcher-prise va à l’encontre de nos diktats de performance. Mieux la comprendre, c’est aborder chaque moment de la vie avec davantage de souplesse. Par Pascale Senk (Psychologies, février 2005)

Renoncer à la toute-puissance

Pour la psychanalyse – qui, dans sa théorie, ignore ce terme et parle plutôt de renoncement –, lâcher prise n’est d’ailleurs pas accessible à tout le monde. « Celui qui n’a pas un espace interne suffisamment construit, explique Nelly Jolivet, psychanalyste, celui qui, pour des raisons liées à son enfance, à ce qu’il a vécu au stade archaïque, lorsqu’il était bébé, n’arrive jamais à être suffisamment rassuré pour renoncer à sa volonté de toute-puissance, celui-là y aura difficilement accès. »

Bonne nouvelle cependant : dans la cure analytique, de petits lâcher-prise réguliers peuvent mener à une certaine transformation de la personnalité. « C’est, de séance en séance, la levée chez le patient de certaines résistances, la dissolution d’une trop grande rigidité… Cela grâce à la confiance gagnée peu à peu dans le lien entre analyste et analysant, et qui rejaillit dans le quotidien de ce dernier », poursuit la psychanalyste.

Des petits renoncements actifs, des mini-abandons proposés aussi dans des techniques psychocorporelles et qui aident à construire davantage de confiance en soi pour se préparer aussi aux plus grands lâcher-prise que nous enseigne la vie : l’orgasme, la gestation et la naissance qui nous traversent le corps, le deuil de ceux que nous aimons, notre propre mort… Combien de sauts dans le vide !

Hommes-Femmes

Avons-nous sacrifié nos différences au nom de l’égalité entre les sexes ? Aujourd’hui, hommes et femmes découvrent que, pour mieux vivre ensemble, chacun doit réaffirmer sa propre identité. Par Pascale Senk (Psychologies, novembre 2001)

(…) Nelly Jolivet, une psychologue de 42 ans qui a été initiée dans un groupe de femmes du Midwest, aux Etats-Unis (5), explique : « A ce moment de ma vie, les rôles étaient un peu chamboulés dans notre couple : c’était moi qui ramenais l’argent au foyer, tandis que mon compagnon s’occupait de notre fils… Tout à coup, j’ai ressenti un intense besoin de me reconnecter à quelque chose d’intemporel et de sacré, qui était passé de ma grand-mère maternelle à ma mère, puis à moi. Je voulais aller à l’essence féminine… Le groupe m’a aidée en cela. »

(5) Woman Within : transitionseurope.com