La folie ordinaire ou passagère

Ordinaire ne signifie pas banal, mais plutôt quelque chose qui pourrait passer inaperçu dans le quotidien pour l’entourage ou les collègues ou les inconnus croisés dans la rue. Cela veut dire qu’il ne s’agit pas de maladie mentale telle que l’entend la psychiâtrie, en général. C’est quelque chose d’une souffrance sourde et qui influence le cours d’une vie.

Passagère me permet de dire qu’éventuellement et idéalement, un jour la plaie est fermée laissant une cicatrice, une marque, un peu comme ces numéros que les déportés portent sur l’avant-bras gauche.

Pour résumer, cette folie-là a sans doute à voir avec le traumatique. J’aime travailler autour des « fluctuations » identitaires que je relie à ce que l’on peut appeler la folie ordinaire ou passagère.

Se libérer de l’emprise d’une personne

Il n’y a pas à ma connaissance de thérapies en tant que telles qui soient en adéquation parfaite avec un problème donné. Les thérapies, quelles qu’elles soient, ne fonctionnent pas comme les médicaments parce qu’il n’y a pas de symptôme-cible, mais une personne avec une souffrance.

Quel psy choisir et comment savoir quelle thérapie conviendrait le mieux ?

Il faut aussi que cela parle au futur patient. Enfin, qui dit thérapie dit « outil » thérapeutique. Ce sont ces paramètres qui permettront sans doute de retenir et d’éliminer certaines thérapies; Ensuite, il faut se faire confiance pour faire le bon choix et rencontrer le thérapeute. Si la rencontre n’ouvre pas sur une perspective de confiance, il faut peut-être choisir un autre thérapeute.

Maintenant et assez brièvement, l’emprise d’un être humain sur un autre laisse supposer que l’un des protagonistes cherche à « guérir » l’autre, s’accroche au fait que c’est encore possible, qu’au fond c’est quand même quelqu’un de bien, qu’il ne l’a pas fait exprès, que cela ne se reproduira plus, etc. Et tient absolument à croire que c’est possible. Tout le problème est là, comment renoncer à quelqu’un qu’on pourrait sauver ?

Sauf qu’il y a erreur sur la personne. Le partenaire cache une autre personne, généralement un parent, vécu comme mal-aimant, dont on attend toujours la reconnaissance et l’amour. Ma description de cette problématique est assez schématique et sans nuance.

Il y a un moment où on doit se décider à être heureux, c’est-à-dire, à mériter d’être heureux et d’être aimé d’une manière équilibrée. Ce n’est pas toujours facile…

Devenir comédienne

Rêve d’adolescente, désir de se transformer à l’infini en endossant des rôles multiples, envie d’être aimée, quête de soi… On choisit ce métier pour une tonne de raisons qui, parfois, nous échappent. Éclairage de spécialiste. Recueilli par Joséphine Lebard (Muze, février 2009)

Comment expliquer qu’à l’adolescence de nombreuses jeunes filles rêvent de devenir comédiennes ?
À 15-16 ans, les jeunes filles se trouvent à un moment charnière de leur vie. On va notamment commencer à les interroger sur ce qu’elles veulent faire plus tard. Pour un garçon qui a de l’ambition, c’est assez évident de l’entendre répondre qu’il va faire une école d’ingénieurs, par exemple. Les filles, elles, sont les héritières d’une histoire générationnelle de femmes, d’un passé qui veut que les femmes ne travaillent pas forcément et d’un destin anatomique qui les destine à la maternité. Donc pour une jeune ambitieuse, il n’est pas toujours aisé de savoir comment réussir. Elle va alors rechercher l’image de quelqu’un qui serait l’idéal d’elle-même. C’est ce que peut représenter une comédienne, mais aussi une écrivaine, une artiste : une catégorie de personnes épanouies, à l’aise dans leur genre sexuel. Alors que la jeune fille s’interroge sur ce que le devenir féminin implique, elle prend pour modèle des femmes qui ont choisi une voie leur permettant de s’exprimer tout en libérant leur féminité. Rêver de devenir comédienne relève souvent de l’identification à un modèle qui attire la sympathie, l’admiration et l’unanimité. Être véritablement aimable.

Dans le film Le Bal des Actrices, Maïwenn Le Besco évoque «le besoin d’amour inouï qu’ont les actrices». Ont-elles vraiment besoin plus que d’autres d’être aimées ?
Ce serait difficile de faire des généralités. Mais souvent, pour contreblancer leur timidité, les comédiens en général choisissent – plus ou moins consciemment – d’eprimer quelque chose d’eux-mêmes à travers un personnage. C’est leur façon de s’ouvrir au monde. Être comédien, c’est agiter un miroir devant les autres afin qu’ils vous disent quelque chose de vous-même, une manière d’exister dans le regard de l’autre, des autres, et enfin aux yeux du monde. Sans doute est-ce là qu’il y a un besoin insatiable de reconnaissance et une demande d’amour.

Éxiste-t-il un profil psychologique type de la comédienne ?
Là encore, il convient de ne pas généraliser. Toutefois, on peut trouver des racines communes. Jouer la comédie, c’est finalement vouloir prolonger le jeu de l’enfance, celui ou règne le conditionnel avec ses fameux «on dirait que». Être comédienne, c’est aussi dire «je» de manière tres forte puisque c’est, d’une part, un métier où il faut s’accrocher, d’autre part une quête de soi à travers l’autre.

En même temps, être comédienne, c’est aussi fuir la réalité puisqu’on choisit tous les jours d’être quelqu’un d’autre… D’abord, je ne suis pas sûre qu’on «choisisse» d’être comédienne… Ensuite, ce terme de fuite ne me convient pas. On pourrait dire cela si la comédienne jouait à partir d’émotions qui ne viendraient pas d’elle. Mais, dans sa technique, l’actrice glisse des faits de son histoire personelle qui ont pu être mal digérés… Dès lors, jouer devient une manière de se réparer soi mais aussi de panser le monde en le distrayant. Pour un être humain, c’est quand même un fabuleux destin que de faire rêver les autres ! Le temps d’un instant, on devient magique !

Mais comment faire la différence entre le désir réel de devenir comédienne et la simple soif de célébrité ?
Je ne suis pas sûre que, lorsqu’on a 18-20 ans, il soit souhaitable de la faire. En effet si on essaie de répondre à cette question à 20 ans et qu’on se rend compte qu’effectivement c’est la célébrité qui nous attire, c’est profondément déséspérant ! Cela revient à admettre que l’on souhaite être une «chose» : n’importe quoi pourvu que l’on soit célèbre. Mieux vaut confronter sa vocation à la réalité du métier.

Je pleure pour un rien

Une sensibilité à fleur de peau, un débordement d’émotions, des larmes qui montent trop vite pour pouvoir être retenues… D’où vient cette hyperémotivité ? Et comment faire pour qu’elle ne soit pas un handicap ? Par Olivia Benhamou (Psychologies, janvier 2008)

(…) Selon la psychanalyste Nelly Jolivet, «cette réactivité émotionelle ramène à la petite enfance. C’est la manifestation d’un défaut dans la formation de notre réalité psychique, insuffisament stabilisée». Pour construire sa propre identité, le bébé a besoin à la fois d’être consolé lorsqu’il souffre et d’être inité et d’être inité à la frustration pour faire l’expérience de sa capacité à satisfaire ses propres besoins. «S’il est surprotégé ou si, au contraire, il éprouve une carence affective, le bébé grandira dans la dépendance, incapable de se construire comme un individu autonome et de mettre des mots sur ses propres émotions. C’est ce qui explique que, à l’age adulte, certains d’entre nous continuent de pleurer; parce qu’ils sont incapables de verbaliser leur ressenti.»

Que faire ?

(…) «Apprenez à verbaliser l’émotion, cela aide à la canaliser. Si vous avez le sentiment de ne plus être crédible aux yeux des autres, d’être infantilisé et dévalorisé par vos larmes, il faut essayer de prendre un peu de distance par rapport à l’émotion, en mettant des mots sur ce qui est étouffé par les pleurs. Cela vous aidera à comprendre ce qui vous touche et pourquoi cela vous touche à ce point. Si vous n’y arrivez pas seul, l’aide d’un thérapeute peut se révéler précieuse.»