Intenses et changeants, les liens que nous tissons avec notre thérapeute sont uniques en leur genre. Éclairage. Par Laurence Lemoine (Psychologies, novembre 2006)
Le transfert : une rencontre sur la scène de l’inconscient
(…) Côté psy, l’alchimie opère de la même manière sur un ressenti très subjectif. « Mon choix de travailler avec un patient, indique Nelly Jolivet, psychanalyste et psychothérapeute, procède de ma conviction de pouvoir répondre à sa souffrance particulière, pour des raisons qui ne tiennent pas seulement à ma formation, mais aussi aux raisons intimes pour lesquelles je fais ce métier. Quelque chose entre en résonance, dans ce qu’il est et ce que je suis, qui va permettre l’amorce d’une relation thérapeutique. » Cette résonance au-delà des mots, sur la scène de l’inconscient, Freud en a rendu compte en élaborant les concepts de « transfert » et de « contre-transfert ». « Le transfert, explique la psychanalyste, c’est ce processus par lequel, sans s’en rendre compte, le patient me met à la place des différentes personnes qui ont compté dans son histoire. Il revit alors avec moi des émotions du passé et, par contrecoup, me fait éprouver un certain nombre d’affects qui constituent mon contre-transfert. » Inévitable, ce phénomène est justement ce qui permet à la cure de progresser, « à condition que le psy ne soit pas dupe des sentiments dont il est le support et qu’il permette au patient de s’appuyer sur le transfert pour progresser ».
Le cadre : un retour au réel
(…) Le cadre, et en particulier le fait de payer ses séances, « est absolument indispensable pour éviter toute confusion quant à la nature de la relation qui se noue, assure Nelly Jolivet. Le psy n’est pas un substitut parental, même s’il peut être mis à cette place dans le transfert. Il n’est pas un ami, même s’il peut tout entendre, y compris des choses que les amis eux-mêmes ne sauront jamais ». Loin d’être un directeur de conscience ou un pourvoyeur de conseils, il apporte avant tout l’écoute attentive et le soutien dont nous avons parfois besoin pour accéder à notre propre vérité et devenir pleinement acteur de notre vie.
La fin : une relation éphémère
Dès lors, la relation thérapeutique est vouée à cesser. Et en cela encore, elle est à nulle autre pareille. « Dans son aboutissement, elle se sèvre d’elle-même lorsque le patient devient capable de voler de ses propres ailes ; et le psy de lui donner du champ sans en être angoissé », indique Nelly Jolivet.